vendredi 18 décembre 2015

L’école de Daech ou l’industrie de l’infanticide ?

L’école de Daech ou l’industrie de l’infanticide ? 


Malgré les revers infligés par la coalition internationale, l’Etat Islamique continue de diffuser l’horreur au travers de sa propagande. Dans son dernier Dal al-Islam, support de communication francophone officiel de Daech, l’Etat Islamique fait une critique du système scolaire français en le désignant comme antireligieux et maçonnique. En pointant du doigt particulièrement les valeurs de la République et de la laïcité, Daech blâme les occidentaux en fustigeant « l’ignorance et la corruption morale […] de la masse et du troupeau inculte et pervers ». Comme à leur habitude, l’article appuie ses arguments par le biais de versets du Coran et de la Sunna. Ils mettent en avant la supposée incompatibilité de l’islam vis-à-vis des valeurs républicaines telles que la liberté de conscience, la laïcité, l’égalité et le refus du prosélytisme. Toujours d’après cet article, les parents musulmans portent la responsabilité de la transmission du religieux et partant « de la mécréance et de la perversion de leurs enfants » en les « jetant dans les antichambres de l’Enfer », à savoir ici, l’école française.
Fort heureusement, plusieurs solutions clémentes et vertueuses sont envisagées par Daech ! Venir faire la hijra dans un pays véritablement musulman (le « territoire » de Daech), attaquer physiquement les fonctionnaires de l’éducation nationale et des services sociaux ou engager leurs propres enfants vers le parachute doré de la mort.
Mais quel sort Daech réserve véritablement à ses propres enfants ? Quel est réellement l’éducation de l’islam tant revendiquée et mis en avant par ce groupe terroriste ?
Des enfants soldats
Début décembre, l’Etat Islamique a publié une nouvelle vidéo glaçante, d’une quinzaine de minutes, mettant en scène six enfants de 10 à 11 ans et de nationalités différentes. Rappelons, au passage, que le droit islamique stipule, dans le cas du djihad offensif, que les enfants aient atteint l’âge de la maturité qui est à 15 ans… Est-ce là le premier paradoxe de Daech ?
En dépit de cette contradiction remarquable dans leurs propres croyances et pratiques de la religion, l’objectif de cette vidéo est de sensibiliser parents, enfants et adolescents à la cause djihadiste à des fins de recrutement.
La construction de la vidéo est remarquable en tout point. L’esthétique est très soignée et les images sont de grande qualité, retouchées par ordinateur. Le montage s’articule en trois phases de tension croissante, mettant le spectateur dans un état psychologique propre à recevoir le message véhiculé.

La première phase, courte, capte l’attention du spectateur en utilisant le procédé de la caméra subjective. Une personne est derrière un ordinateur et surfe sur les réseaux sociaux. Le spectateur devient actif en s’identifiant au personnage. Cette phase fait référence à l’étape d’endoctrinement par l’Internet.

La deuxième phase, un peu plus longue, évoque l’éducation coranique et la formation des enfants au combat. Le rythme est calme, les séquences longues et le maître est mis en avant comme étant le messager. La première moitié de cette phase montre une classe en plein désert récitant des versets du Coran. Ensuite, toujours avec le même maître, ces enfants s’entrainent aux techniques de combat rapproché. Le spectateur redevient alors témoin, en assistant aux différentes étapes qui mettent en valeur la formation idéale selon Daech : l’esprit du djihad et le corps du guerrier. Ou devrions-nous dire « l’apologie du meurtre et les techniques de la violence » ?

La troisième phase, plus macabre, plus longue et plus saccadée, présente six enfants désignés pour exécuter des prisonniers. Ils sont sélectionnés parmi les plus méritants de la phase précédente. Leur nom et leur visage sont présentés comme dans un jeu vidéo. Ces « méritants » sont alors introduits sur leur « terrain de jeu », une forteresse abandonnée. Un homme les y attend, prêt à leur remettre une arme. En même temps qu’ils se saisissent de l’arme, ils revêtent la cagoule du bourreau. Cette phase est importante dans sa symbolique, les enfants sont dépersonnalisés, l’individu est gommé au profit du groupe. S’en suit un jeu de piste dans la forteresse où les enfants doivent retrouver et exécuter les condamnés. Dans leur parcours, ils trouveront diverses récompenses comme une lampe torche et un couteau. On se croirait dans le dernier Call of Duty !!! Les exécutions sont ritualisées et esthétisées, le sang versé et l’agonie des condamnés sont mis en avant. Le dernier enfant se voit autoriser la récompense suprême, exécuter son prisonnier en l’égorgeant au couteau.

La mise en scène, tel un jeu vidéo, aide à s’éloigner de la violence brute et met en avant l’exécution de la justice. En aidant le spectateur à se distancier de cette violence, le montage renforce le message du caractère impitoyable du jihad, que tout musulman se doit de transmettre à sa descendance. Faire de nos enfants des guerriers et des bourreaux, voilà l’éducation de Daech !
L’école républicaine
Selon Daech, l’éducation républicaine et laïque serait une perversion de l’âme de nos enfants face à la pensée unique du djihadisme. Mais quelles sont les valeurs qui leur font donc tant peur ? Pour aborder le sujet, il est intéressant de revenir sur les fondements de l’école républicaine. L’héritage rationaliste des Lumières, une foi romantique et positiviste dans le progrès humain, des valeurs universelles et universalisables, et l’aventure de la responsabilité démocratique d’un peuple à la fois souverain et éclairé.
A la différence des gouvernements précédant la période des Lumières, la République est un gouvernement pensé par les Hommes et pour les Hommes. Ces nouveaux penseurs appelés Humanistes rejettent les dogmes de l’église. L’école d’aujourd’hui est encore emprunte des valeurs de la loi de 1882 de Jules Ferry. Anticlérical mais pas antireligieux, l’objectif de sa loi de laïcisation de l’école était de faire sortir du programme tout dogme. L’instruction religieuse appartient dès lors aux familles et à l’Eglise.
Notre système éducatif emprunte plusieurs de ses fondements à l’époque gréco-romaine. La référence la plus significative de cet héritage historique serait la théorie de la maïeutique platonicienne. Au-delà de l’acquisition de connaissances pures et dures, cette méthode permet la confrontation de plusieurs idées, positions et observations de l’être humain. Par la négation et la réconciliation interne d’idées, un cheminement prend forme pour atteindre un raisonnement propre à chacun. Au contraire, Daech interdit toute critique salvatrice de l’Homme en imposant l’ordre du Sacré. L’enfant n’est plus maître de son raisonnement mais assujetti à la seule et unique parole transcendantale.
L’existence du monde des idées où tout s’interroge, se discute, se comprend dérange, car elle conduit un peuple à se libérer de ses jougs, et à se construire en une civilisation éclairée. L’école républicaine, c’est la liberté d’avoir le choix, la liberté du partage de connaissances et la faculté à dépasser les préjugés.
A peine mis au monde, les enfants djihadistes sont conditionnés pour mourir « physiquement et psychiquement ». La violence des corps et la contagion des esprits sont les constantes immorales que combat notre système éducatif. Voilà la force terrifiante qui fait trembler Daech : notre esprit critique et notre liberté de conscience !

mardi 8 décembre 2015

La Mécanique DAECH accuse !


La Mécanique DAECH accuse !
Le vrai visage des pourvoyeurs djihadistes de l’Internet,
Le cas d’Archive.org

Les nouveaux moyens de communication issus de l'Internet et de ses dérivés (plateformes de médias en tout genre, réseaux sociaux, etc…) ont profondément changé la donne des modes opératoires des groupes terroristes. La guerre ne se fait plus seulement sur un terrain physique mais s’établit et se pense au sein d’une sphère virtuelle. Comme toute technologie qui se respecte, l’Internet possède des failles qui profitent à une propagande djihadiste pénétrée par une communication guerrière et profondément abjecte.
Les événements tragiques de ces derniers mois et les mesures prises par la communauté internationale sont autant d’étapes insufflant une prise de conscience aux grands acteurs de l’Internet et des réseaux sociaux. Face à un laisser-faire massif, une coopération entre ces derniers (Apple, Facebook, Google, Microsoft, Twitter) et les autorités gouvernementales françaises a été mise en place dans le but de lutter contre le terrorisme, la radicalisation sur l’Internet1, et responsabiliser des grands opérateurs.
Or, les hébergeurs de contenus faisant l’apologie du terrorisme s’investissent de manière inégale dans la coalition menée contre le terrorisme sur la toile. Pire, certains exploitent la renommée des groupes islamiques pour en tirer des avantages médiatiques et financiers et ce, en dépit de la résolution 2199 adoptée par le Conseil de Sécurité des Nations Unies qui ordonne le gel des « ressources financières et économiques » des groupes djihadistes y compris « celles qui sont utilisées pour l’hébergement de sites internet et de services connexes »2.
Dans ce cas, Archives.org manifesterait un positionnement qui relèverait d’un certain flou artistique. Cette plateforme, qui n’est pas exclusivement dédiée aux contenus des groupes terroristes, met à disposition des internautes du contenu multimédia (vidéo, audio, texte, software, PDF, GIF, etc.) et classe ces mêmes contenus dans des catégories et sous-catégories. Daesh n’a qu’à se frotter les mains de cette aubaine numérique pour développer et affiner sa propagande.
A l’instar de toute entreprise ou organisation, le groupe extrémiste fait appel à ses propres agences de communication pour instaurer un lien avec leurs cibles en élaborant un positionnement à forte visibilité sur l’ensemble des terrains d’opérations (physique et virtuel)3. Les produits de communication labélisés Daesh assimilent l’adhésion à la reconnaissance de la vérité absolue, par le biais de symboles forts et de discours relevant de la religion, de l’histoire mais aussi de la décrédibilisation de l’ordre établi. Ces discours fanatiques méconnaissent le caractère propre de la démarche argumentative et se contentent de persuader par la force, la terreur et le spectaculaire.
Quelques clics suffisent sur le site Archive.org pour accéder à des vidéos, images et bandes-son nous plongeant dans l’univers macabre de Daech. Le plus souvent, ces supports de communication font appel au rassemblement, au meurtre et poussent le vice jusqu’à la mise en scène d’exécutions et de maltraitance. En témoignent les prises d’écran suivantes, retraçant en partie les exactions et actes effroyables de Daesh :


Le calife de l’Etat islamique, Aboû Bakr al-Baghdâdî, prenant la parole dans une mosquée


Exécution d’un espion avec pour support textuel un passage du religieux à la menace



Vidéos relatant les exactions menées par Daesh depuis l’instauration du califat.


En ignorant le contenu exploité par les djihadistes, Archive.org semble se positionner dans un premier temps comme victime passive d’un mouvement extrémiste. Un instant de réflexion suffit pour constater que son implication et sa responsabilité sont bien plus importantes que celles d’un simple pourvoyeur de contenus multimédia. Par son inaction, cette plateforme contribue à la diffusion mondiale de contenus terroristes qui cherchent à recruter de nouveaux combattants, menacer des populations innocentes... Par avance assuré de la tendance de son auditoire, on serait en droit de se demander si finalement cette plateforme de partage de contenus ne deviendrait pas le complice actif de crime contre l’humanité.
Face à cette montée en puissance des groupes islamistes extrémistes sur le web et ses réseaux sociaux, des outils au service des pouvoirs régaliens ont été mobilisés pour s’engager durablement dans la lutte contre l’apologie du terrorisme et de ses dérives sectaires. La loi sur le renseignement marque la progression notable de la France dans le traitement numérique du terrorisme. Au-delà des polémiques que cette loi a pu susciter dans la sphère publique et médiatique, nous n’en restons pas moins conscients des avancées qu’elle engendre. Les hébergements sont soumis à une nouvelle règlementation qui les contraint à accepter une captation en temps réel des données de connexion et la mise en place de boites noires. Investir dans les moyens numériques serait une des solutions incontournables face aux contenus incitant au terrorisme ou faisant son apologie. Ainsi, le code pénal français prévoit une condamnation pouvant aller jusqu’à 7 ans de prison et 100 000 euros d’amende « lorsque les faits ont été commis en utilisant un service de communication au public en ligne ». Par ailleurs, l’article 6 de la loi 2014-1353 du 13 novembre 2004 « pour confiance de l’économie numérique (LCEN) », oblige, elle aussi, les Fournisseurs d’Accès à Internet (FAI) et les hébergeurs à « concourir à la lutte contre la diffusion ».
Parler c’est agir. Laisser parler c’est collaborer…



1 Le 03 décembre 2015 à Matignon, réunion de travail avec les grands acteurs de l’Internet et des réseaux sociaux, et le gouvernement français.
2 ONU/CSNU : résolution 2199 adoptée par le CSNU le 12 février 2015 
3 www.mediapart.fr : « Les rouages de la communication terroriste : comment comprendre les enjeux de la peur »,