Nous
allons aborder ici les incohérences techniques du lancement du dinar
de Daech. Elles sont –très- nombreuses !
- Pas de taux de change
Cette
initiative poursuit un but idéologique. "Comme à l’époque
des rois du Moyen-Âge, cela leur permettra de fixer arbitrairement
la valeur des choses selon leur propre code moral, sans qu’il soit
possible de faire des comparaisons internationales, puisque personne
d’autre n’utilise cette monnaie et qu’il n’existera pas de
taux de change”, explique Pascal de Lima, directeur de cabinet de
conseil EcoCell et spécialiste du système financier.
Mais ces métaux permettront à cette monnaie de ne pas être convertible et de fixer arbitrairement la valeur des choses selon le code moral de l'EI Puisque personne d'autre n'utilise cette monnaie, des comparaisons internationales seraient impossibles et le taux de change serait inexistant.
Mais ces métaux permettront à cette monnaie de ne pas être convertible et de fixer arbitrairement la valeur des choses selon le code moral de l'EI Puisque personne d'autre n'utilise cette monnaie, des comparaisons internationales seraient impossibles et le taux de change serait inexistant.
- Usage impossible en dehors des « frontière de l’auto-proclamé Etat Islamique »
Des
experts en finance estiment qu’il est très peu probable que la
monnaie de Daech se développe au niveau international. A l’heure
de la transparence bancaire, aucune institution financière crédible
ne pourra en effet l’accepter. Cette nouvelle devise ne peut être
reconnue officiellement et ne pourra donc pas servir à des échanges
en dehors du territoire contrôlé par ce groupe.
De plus, le billet vert risque de toujours rester la référence en termes de transactions : l'embargo financier décrété par la communauté internationale à l'encontre du mouvement terroriste devrait dissuader tous ses fournisseurs de se faire payer dans une monnaie aussi compromettante que celle de l'EI.
De plus, le billet vert risque de toujours rester la référence en termes de transactions : l'embargo financier décrété par la communauté internationale à l'encontre du mouvement terroriste devrait dissuader tous ses fournisseurs de se faire payer dans une monnaie aussi compromettante que celle de l'EI.
«
C'est comme des diamants de guerre (blood diamonds), » explique
David Phillips, ancien conseiller des Nations Unies, aujourd'hui à
l'Institute for the Study of Human Rights de l'université de
Columbia. Il expliquait au New-York Times, l'année passée, «
Aucune institution financière crédible ne va accepter ça. »
“Personne,
en dehors du territoire contrôlé par Daech, n’acceptera cette
monnaie (…). Finalement, cette devise est un outil de propagande
médiatique”, conclut lui aussi
l’économiste irakien Jameel Basim.
- Une monnaie locale ?
Cette
monnaie pourrait en revanche techniquement être lancée à un
échelon local, mais, pour des raisons évidentes, sa forme « or »
ne pourra pas être en circulation courante ; seul le dirham
d’argent à la rigueur ; mais surtout sa sous unité en cuivre
seront réellement utilisables...
Hormis
peut-être au Qatar, Luxembourg ou Suisse, peu d’états sont dotés
d’un pouvoir d’achat permettant l’usage de pièces d’or. Son
existence en Syrie et Iraq est donc purement symbolique. Il
s’agirait d’un dinar d’or qui en réalité ne circulerait pas…
Si
la monnaie existe depuis déjà plusieurs mois, pour l’instant,
même à l’intérieur des territoires contrôlés par l’Etat
Islamique, le dollar règne en maître. Les salaires des djihadistes
seraient ainsi payés encore en dollars.
Plusieurs
monnaies (parfois dinar d’or) locales « parallèles »
ont été mises en place dans d’autres pays ; notamment en
Libye, Indonésie, Malaisie, US… Le but est à chaque fois
de garantir une très forte stabilité. Quoi qu’il en soit une
monnaie locale ne concurrence pas une monnaie nationale ou
supranationale. En tant que monnaie complémentaire, elle fonctionne
en parallèle. De fait, elle n’impacte pas l’économie globale.
- Problème de dépendance à l’or, à l’argent et au cuivre : risques d’inflation et de déflation
Historiquement,
la rareté de l’or a été compensée par la disponibilité de
l’argent comme alternative. Cela étant, les métaux précieux
utilisés comme monnaie d’échange étaient difficiles à diviser
et à vérifier.
La
dépendance à l'or, à l'argent et au cuivre devrait aussi poser des
difficultés selon les spécialistes. Le cours de ces métaux varie
fortement comme le cours des matières premières. Il y aurait alors
risque d’inflation ou de déflation.
Leur
prix est en effet aujourd’hui fixé par ces mêmes marchés
financiers que Daech espérerait combattre…Si les cours augmentent
subitement, cela pourrait être très préjudiciable pour Daech (la
facture du groupe terroriste pourrait très vite exploser).
Ci-dessous,
évolution du cours de l’or depuis 40 ans, puis des deux métaux
précieux depuis 660 ans
Source :
http://goldsilverworlds.com
Ainsi,
nous pouvons constater que malgré l’inflation, le cours de ces
métaux précieux est loin d’être en constante hausse, et d’autant
moins caractérisé par la stabilité….
Par
ailleurs, quand bien même Daech serait considéré comme une
sérieuse menace, le marché de l’or pourrait faire l’objet d’une
assimilation à la fraude et au financement terroriste, ce qui
pourrait vivement impacter la demande, et donc les cours...
- Problèmes d’approvisionnement
Se
pose ensuite la question de l’approvisionnement en métaux
précieux. La monnaie se réfère exactement au dinar d’or
originel, qui était constitué de 4,3g d’or pur, ce qui
nécessiterait des quantités d’or considérables pour frapper
cette nouvelle monnaie.
Exemple rapide
: Pour 60 millions d’habitants en Syrie et Irak (sans prendre en
compte les flux migratoires bilatéraux actuels), rien qu’un unique
dinar d’or / personne… représenterait 258 tonnes d’or… En
comparaison, les réserves cumulées de ces 2 pays s’élèveraient
à 62 tonnes (moins les stocks dont Daech s’est emparé à
Mossoul). 20 pays dans le monde possèdent plus de 230 tonnes dans
leur réserve.
Même
si Daech gagnerait près de 8 millions de dollars chaque jour (dont
38% en vendant au marché noir le pétrole des champs syriens et
irakiens contrôlés par les djihadistes), comment peut-elle
s’approvisionner en or ? De façon illégale, sur le marché noir ?
En tout cas certainement pas au London Bullion exchange (marché des
métaux précieux de Londres).
La
dépendance à ces métaux est, d’après de nombreux experts, l’une
des raisons qui rendent le projet difficile, voire impossible à
mettre en œuvre. "Pour fondre l’or, par exemple, Daech devra
en acheter sur le marché noir ce qui donne aux États-Unis et à
leurs alliés un nouveau moyen de traquer les membres de ce groupe”,
note Pascal de Lima (économiste et enseignant à Sciences-po).
- Quand l’ « État islamique » s’improvise banque centrale : une charge administrative et logistique contre-productive
«
Quelqu'un doit être en charge de cet argent et doit le gérer
d'une manière très sophistiquée, » expliquait Anthony Cordesman
(responsable des questions de stratégie au Center for Strategic
and International Studies)
La
monnaie "devra être frappée dans des établissements spéciaux
ayant reçu l'aval du calife Al-Baghdadi" précise Olivier
Hanne, spécialiste de l'histoire de l'islam à Metronews.fr. Mais la
liberté d'action du califat pose question compte tenu des frappes
aériennes menées contre lui.
Outre
les problèmes dépendances aux métaux, et autres aspects
strictement monétaires, Daech devra (comme tout État) gérer les
conséquences administratives et politiques considérables
qu'entraîne cette initiative. Cela nécessitant « une économie
extrêmement centralisée et autoritaire » rappelle Sébastian SEIBT
journaliste à France 24.
Rien
ne dit que l’EI dans sa forme actuelle ne soit capable de gérer
les conséquences administratives et politiques qu’entraîne cette
initiative. "Même l’Union soviétique n’a pas réussi [ce
que l’État islamique ambitionne de faire], car cela nécessite une
économie extrêmement centralisée et autoritaire”, souligne
Pierre-Cyrille Hautcoeur, un spécialiste de l’histoire des
institutions et marchés monétaires et financiers.
En
réalité, en plus, « Comme la fabrication de la monnaie se
fait aux dépens des produits métalliques, il n'y aurait pas de
vraie Banque centrale et donc impossibilité de pratiquer une
politique monétaire. »
- Risques de fraudes
Le
risque de contrefaçon n’est pas non plus négligeable. Il est, en
effet, plus facile de fabriquer du faux or, ou du faux argent que des
faux billets… Ce risque de fraudes et de circulation de fausses
pièces, est évident au lancement d’une nouvelle monnaie.
“Qui
s’assurera que le dinar est vraiment en or ?”, s’interroge
Pierre-Cyrille Hautcoeur (Économiste et historien, directeur
d'études à l'EHESS). À moins de mettre un policier à chaque coin
de rue pour traquer d’éventuelles fausses pièces, la population
risque rapidement de ne plus avoir confiance en cette nouvelle
devise. Cette nouvelle monnaie est, donc, une porte ouverte à une
inflation administrative, d’autant plus si Daech réussit à
conquérir de nouveaux territoires.
Il
faudrait, en effet, mettre en place des contrôles à tous les
niveaux qui seraient non seulement mal perçus par les populations
locales, mais aussi très chers en ressources humaines et en
infrastructures. L’État islamique devra, notamment, rendre les
différentes frontières totalement étanches pour “éviter un
coûteux trafic de ces pièces”, remarque Hautcoeur. La tentation
pourrait, en effet, être grande d’aller échanger dans les pays
voisins ces dinars en or contre des dollars ou d’autres devises.
Enfin
pour que la population ait confiance dans une nouvelle monnaie (l’une
des conditions sine qua none pour qu’elle le soit), elle doit avoir
la certitude que la monnaie avec laquelle elle paie est bien
constituée d’or, d’argent ou de cuivre. Tout ce dispositif
nécessite énormément de ressources humaines et d’infrastructures,
comme établir des douanes aux frontières par exemple.
DONC :
GOLDEN DINAR = PROPAGANDE de DAECH
Cette nouvelle tentative d’instauration d’un dinar d’or est en
fait contre-productive au regard des ambitions de l’organisation
terroriste. Même si l’Etat islamique dispose de ses propres
réserves d’or, les obstacles sont bien trop nombreux et ne peuvent
être contournés. Loin de cimenter les fondements d’un nouveau
califat, cela risque de s’avérer profondément ruineux pour
celui-ci.
La seule réussite momentanée d’une telle annonce pourrait
éventuellement se traduire par l’effet galvanisateur de ce
« buzz », au sein des troupes de Daech.
Les moyens sont là : images de qualité, intervenants et
exemples plutôt pédagogiques, compréhensibles par tous. Une
certaine puissance ressort de cette propagande (dont c’est
bien l’effet escompté !), oui, c’est certain, si l’on
fait fi de : la fraude certaine et facile, l’évolution des
cours des métaux, la non reconnaissance internationale, les
multitudes de casse têtes de gestion administrative, les problèmes
d’approvisionnement, etc, etc. alors, oui, peut-être on pourrait y
croire…(et la marmotte…).
Comme toujours Daech instrumentalise le Coran afin de trouver de
vagues justifications à leur action, tout en occultant la réalité.
Le spectateur voudrait croire que se déroule actuellement au
« Sham » (territoire situé entre Syrie et Irak), une
« grande prophétie mondiale » ; que Daech combat
l’Antéchrist avant la fin du monde, et que rejoindre Daech sera en
quelque sorte une aventure palpitante où il deviendra « quelqu‘un »
(doté d’une certaine puissance), tout en étant certain d’être
du « bon côté »…
Certains pourraient en effet croire que la constitution de cette
monnaie fantoche constitue là, à la fois la volonté du Prophète,
mais aussi et surtout une victoire sur l’occident ; la
dernière étape pour devenir un authentique Etat Islamique, et que
celui-ci pourrait fonctionner, voire même être reconnu… (Bien
entendu, sans corruption, ni détournements, sans perversion d’aucune
sorte et toujours dans LA vérité…et encore la marmotte…).
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